Jardins collectifs : de nouvelles connaissances acquises dans le cadre du PRSE3

Dans le cadre de la sous-action 1 de l’action 2.1, des travaux ont été conduits par le Cerema, l’Ineris et l’Inrae pour approfondir les connaissances concernant le transfert de polluants vers les plantes potagères et les sols en lien avec les retombées atmosphériques, l’arrosage et les pratiques de jardinage. Ces données permettront de mieux appréhender les risques sanitaires liés à l’ingestion de végétaux auto-produits et à l’ingestion de sols et de poussières pour les usagers pratiquant le jardinage ou fréquentant les lieux de jardinage.

Transfert des polluants vers les végétaux cultivés

L’Ineris a réalisé une synthèse autour de différents projets concernant le jardinage urbain, en particulier en Ile-de-France, pour faire un point sur l’état des connaissances produites sur la question des transferts de polluants vers le végétal à partir de l’environnement, sur les moyens de limiter les transferts et les expositions ainsi que sur les modalités d’études relatives au jardinage urbain.

La revue de projets existants a montré que certains aspects semblent encore assez peu étudiés tels que la qualité des composts et des eaux d’irrigation ainsi que la contribution de l’air aux transferts de polluants vers les végétaux. Certains projets en cours tentent de répondre à certaines de ces questions, notamment le projet POTAGERS pour le compost et le projet CARTHAGE pour les transferts de polluants organiques de l’air vers les végétaux.

Sur la base de la revue des projets et du retour d’expérience de l’Ineris, des recommandations d’aménagement ou comportementales sont préconisées afin de limiter l’exposition des populations. Ces recommandations concernent notamment :

  • l’implantation des jardins à distance des axes routiers à fort trafic,
  • l’installation de bacs hors sol (assortie de précautions pour éviter l’envol de poussières),
  • le recouvrement ou la limitation de la présence de sol nu, le mode de préparation des végétaux (lavage, épluchage…),
  • le lavage des mains.

Néanmoins, une bonne connaissance des milieux et des habitudes des jardinier(e)s est indispensable pour fournir des recommandations adéquates et préconiser les mesures de gestion les plus adaptées à chaque situation. Par ailleurs, la pérennité et la mémoire de ces recommandations sont essentielles afin de réduire efficacement les expositions des jardinier(e)s. Les enquêtes de terrain (rapport Inrae) montrent toutefois que ces recommandations sont peu suivies (perte de l’information, turn-over des jardinier(e)s etc.).

Enfin, il ressort de ces travaux le besoin de mieux prendre en compte les usages existants (alimentaires, récréatifs, espaces de biodiversité, etc.) et la qualité des milieux à l’interface avec le végétal pour améliorer la compréhension des transferts et des expositions et ainsi identifier la contribution spécifique de chaque source de contamination et voie d’exposition dans l’exposition globale.

Retour d’expérience des pratiques culturales des jardinier(e)s

Fort de son expérience d’enquêtes auprès de nombreux jardiniers amateurs et de l’ensemble des acteurs concernés, l’Inrae a réalisé un retour d’expériences sur les pratiques culturales des jardinier(e)s. Principaux points à retenir :

  • Le premier point est d’ordre terminologique : de nombreux services de l’état, associations et chercheurs s’accordent aujourd’hui pour distinguer le jardinage collectif amateur du monde de l’agriculture urbaine professionnelle car les mesures de gestion de risques ne sont pas transférables d’un domaine à l’autre – le monde professionnel peut être encadré, pas le monde des amateurs.
  • Le deuxième point à souligner : compte tenu de la pluralité et l’extrême variabilité des pratiques et de leur forte variabilité (y compris pour un même jardinier), il n’est pas possible de faire porter la gestion des risques sur le comportement des jardiniers-amateurs ; il est donc préférable de mettre en place ces usages sensibles dans des sites aux meilleures qualités environnementales possibles (sol, air, eau). Il est donc préconisé d’éviter le jardinage sur des sols aux contaminations supérieures à ce que l’on observe dans les terres agricoles en accord avec les valeurs proposées par le Guide ARS (2022).
  • Le troisième point vise à concilier les multiples fonctions des sols urbains et des usages sécurisés : lorsque les contaminations ne permettent pas d’envisager un usage alimentaire, des alternatives (cultures ornementales, espace de biodiversité, espaces de régulation thermique, hydrique etc) sont évaluées en prenant en compte la qualité des sols des sites concernés pour préserver la santé des populations et développer une ville durable.
  • Le quatrième point met en lumière la nécessité de mieux évaluer la qualité de l’eau et la qualité des composts utilisés en jardinage, ce que confirme la synthèse bibliographique de l’Ineris. Les nombreuses inconnues sur la qualité des composts urbains produits par les jardiniers amateurs invitent à aborder les principes de l’économie circulaire avec précaution en attendant que les connaissances sur les composts urbains soient plus robustes.

Concernant la place de l’histoire dans la connaissance des sols et leur gestion, deux limites ont été montrées :

  • L’expertise historienne universitaire n’est ni suffisamment mobilisée dans les diagnostics historiques urbains ni bien recensée dans les bases de données dédiées aux sols.
  • Les données sur les sols (péri)urbains sont encore à développer. Se pose aussi le problème de l’accessibilité à ces données par les usagers et collectivités. Ces incertitudes sur l’histoire des contaminations des sols invitent à la prudence par rapport aux choix d’aménagement.

Améliorer la connaissance des sols urbains

Il est désormais nécessaire d’inscrire la prise en compte des jardins collectifs urbains et plus largement des sols (péri)urbains dans l’optique One Health dans le respect des milieux concernés et de la santé des populations (projets en cours).

La connaissance des sols urbains, incluant notamment leur degré de contamination, est un préalable à tout aménagement de nature en ville et tout particulièrement lorsqu’un usage sensible (fréquentation de jeunes enfants, consommation de productions potagères cultivées en pleine terre) y est recherché. Un certain nombre de travaux de recherche et opérationnels se sont intéressés ces dernières années au lien entre facteurs environnementaux, leur dynamique spatio-temporelle, et contamination des sols urbains.

Dans ce cadre, le Cerema a travaillé à la construction d’un système d’information géographique (SIG) permettant de représenter, à l’échelle de la tâche urbaine francilienne, un indice de pression polluante potentielle, mobilisant les couches d’informations géographiques disponibles. Cet indice permet ainsi d’avoir une classification des sols non imperméabilisés qui peut permettre d’exclure, en première approche (en absence d’analyse des sols en place), les surfaces associées à un indice élevé dans le cadre d’un aménagement de nature en ville avec usage sensible (culture potagère en pleine terre, fréquentations d’enfant).

Une seconde partie des travaux menés par le Cerema est liée à la capitalisation des données disponibles sur les sols en Ile-de-France, leur structuration au sein d’une base de données et leur exploitation statistique et cartographique. La base de donnée a été structurée sur le modèle de la base de données des sols urbains (BDSolU) gérée par le BRGM. Un travail de contextualisation des gammes de concentration en substances potentiellement polluantes des sols franciliens a été tout d’abord mené. Ces gammes de valeurs sont celles utilisées pour construire les valeurs repères du guide "Aménager un jardin collectif (ARS - mai 2022). Différents producteurs de données (organismes de recherche, collectivités) ont ensuite été contactés afin d’échanger sur l’existence de données sur leur territoire, sur leur mise à disposition et plus largement sur les besoins de montée en compétence et de partage d’expériences autour des questions de gestion de la contamination des espaces de nature en ville. D’ores et déjà un certain nombre de données ont été rassemblées et doivent faire l’objet d’une première analyse. Se pose aussi la question de l’accessibilité de ces données aux collectivités et usagers. Pour régler cette question un modèle de convention cadrant l’utilisation des données a été établi et signé par plusieurs collectivités. Le travail de contact des propriétaires de données est toujours en cours.

Le rapport du CEREMA est en cours de finalisation et sera prochainement publié sur son site internet  : https://www.cerema.fr/fr/mots-cles/jardins-partages

Guide "aménager un jardin collectif"

Pour rappel, dans le cadre de l’action 2.1 du PRSE3, l’ARS a publié un guide à l’attention des collectivités territoriales pour l’aménagement de nouveaux jardins collectifs. Le guide, prépapré notamment avec l’appui des expertises de l’INERIS, de l’INRAE et du CEREMA est téléchargeable sur le site internet de l’ARS : https://www.iledefrance.ars.sante.fr/guide-amenager-un-jardin-collectif

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